Diego, l'adoption sous un autre jour : c'est le titre du témoignage théâtral que présenteront Michèle Bromet-Camou, psychologue, psychodramatiste et Blandine Clémot, comédienne et psychothérapeute les 10 et 11 septembre au Patronage laïque.
Il s'agit d'une adaptation du livre La Désadoption, de Florence Périer et Michèle Bromet-Camou. Ce témoignage sera suivi d'un débat animé par Anne-Marie Illera, psychologue à l'Aide sociale à l'enfance. Entretien.
- A l’origine de ce témoignage théâtral, il y a un livre, La Désadoption, coécrit avec la mère adoptive d’un enfant et paru en 2008 aux éditions l'Harmattan. Que raconte ce livre et quelle place y tenez-vous ?
Michèle Bromet-Camou. J'ai rencontré la mère adoptive alors qu’elle était en train d’écrire son histoire. Elle m’a touchée ; j’ai eu envie de la lire, de lui renvoyer ce que j’en éprouvais. Il se trouve que j’avais beaucoup travaillé sur l’adoption auparavant. J’ai eu envie de l’aider et de m’aider à aborder l’adoption sous un angle plus complexe. Quand on est de bons parents, est-ce que ça suffit pour adopter l’enfant d’une autre culture, avec d’autres valeurs ? L'adoption, ce n’est pas qu’une question de désir des parents ; c’est au creux d’une histoire familiale, culturelle et politique. « La désadoption », c'est un terme que j'ai inventé ; ça me fait penser à divorce, c’est aussi penser qu'on s'est trompé. Si, légalement, un enfant peut être adoptable quand il n’a pas de nouvelle de sa famille pendant plus d’un an, la loi ne se pose pas la question de savoir si l’enfant est affectivement adoptable. Dans cette histoire, le lien de l'enfant avec ses parents biologiques a été coupé très tôt. L'enfant a été adopté à sept ans. Il est entré dans une famille, dans des liens affectifs qui sont pour lui une menace.
- Dans ce livre, vous insistez sur le fait qu'il ne s'agit pas de désigner de coupable.
Michèle Bromet-Camou. Je ne pense pas que la faute puisse être attribuée à un individu. Ce sont des dysfonctionnements dans la relation, des choses qui s’enchaînent, qui font boule de neige et conduisent à la catastrophe. Dans le jugement d’adoption, il est dit aux parents : « vous allez faire vôtre cet enfant". Est-ce qu’on peut accuser ensuite les parents de le faire ? Est-ce qu’on peut accuser un enfant qui a vécu sept ans hors d'une famille de ne pas entrer dedans ? Nous, travailleurs sociaux, devrions avoir une formation suffisante pour accepter qu’il y a différentes façons de pousser. C’est une question de formation, et d’avoir l’esprit assez large. On ne peut pas faire de l’Aide sociale à l’enfance sans faire aussi de l’aide sociale à la famille. Ce n’est pas la même chose de vivre en foyer et en famille.
- Qu'apporte ce témoignage théâtral par rapport au livre ?
Michèle Bromet-Camou. Je dis souvent que les mots sont des menteurs. Il s'agit d'aller toucher le public autrement que dans une explication rationnelle. Je trouve que le corps est plus juste que les mots. C’est le psychodrame qui m’a amené à mettre en jeu ma pratique. Je dis aux patients d’essayer de représenter leur histoire au lieu de m'en parler. Dans toutes mes interventions, je prévois des saynètes. J’aime que ça se vive, que ça s’exprime autrement que par les mots. C’est aussi une belle rencontre avec Blandine Clémot.
Blandine Clémot. Le but de ce témoignage, c’est d’ouvrir la parole, de susciter les échanges et d'amener un autre questionnement autour de l’adoption. Et autour de tous les enfants pris dans des messages de double loyauté : enfants adoptés, familles recomposées, enfants tiraillés entre deux parents.
- Comment se présente ce témoignage théâtral ?
Michèle Bromet-Camou. Dans un premier temps, j’interprète le conscient, qui commence à raconter l’histoire comme un conte de fée « Il était une fois un couple… ». Arrive l’inconscient, interprété par Blandine, qui démonte toute la bonne volonté consciente. Dans un second temps, Blandine joue le rôle de l’enfant et moi celui de la maman. C'est cohérent, car ce que l’inconscient donne à vivre au conscient est du même ordre que ce que l’enfant donne à vivre à la mère. L’enfant dis "je ne suis pas là où tu veux que je sois". Le conscient c’est le projet parental, le bonheur pavé de bonnes intentions.
Propos recueillis par
Véronique Duval.
Note. Une équipe de tournage sera présente le 10 septembre pour filmer ce témoignage théâtral, en vue de la préparation d'un documentaire sur l'adoption pour France télévision.
Infos pratiques
Les 10 et 11 septembre au Patronage laïque à 20h30.
Réservation conseillée, tarif 10 euros.
Renseignements :
resonances7@gmail.com
Tél 05 49 75 69 75.